Nu artistique, érotisme et pornographie
- Thierry SMETS
- 23 avr.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 3 mai
« Oui mais moi, je ne fais que du nu artistique ! »
C’est la réponse que donnent la plupart du temps les photographes qui font régulièrement de la photo de nu, surtout lorsqu’ils sont interpelés par des personnes ayant un problème avec la nudité et, plus encore, avec la sexualité.
Comme si le fait de faire du « nu artistique » réglait la question (le problème de ces personnes), comme si c’était une justification ou une excuse, comme si le « nu artistique » était acceptable alors que les autres types de photos mettant en scène une femme nue, un homme nu ou un couple nu ne le seraient pas.
Il y aurait donc, apparemment, une nudité plus acceptable qu’une autre, une limite à ne pas franchir, celle de l’art, pour rester un photographe respectable.
Le souci, c’est que l’érotisme peut être artistique, de même que la pornographie.
Que l’on songe, par exemple, à « L’origine du Monde de Courbet » (entre autres).
Certes, c’est de la peinture. Mais pourquoi en irait-il autrement quand il s’agit de photographie ?
Peu importe le support (dessin, peinture, sculpture, photographie, cinéma …), peu importe ce qu’il montre (nu caché, pose érotique, acte sexuel …) , l’expression de la nudité peut être artistique si telle est la démarche de l’artiste, s’il se montre créatif, original, s’il interpelle, s’il questionne le spectateur, s’il recherche le beau ou la provocation … L’art a ses raisons que la raison ne connaît pas, il ne fixe pas de limites à l’imagination.
Bien sûr, le nu caché passera plus facilement auprès de personnes pudiques. Il n’est pas pour autant plus respectable ni plus artistique en soi qu’une photo explicite qui ne cache rien de l’anatomie du modèle.
Bon d’accord, « mais moi, je ne fais que de l’érotisme, pas de la pornographie ».
Surtout, pas de pornographie. La pornographie, c’est mâle (la faute d’orthographe est volontaire).
La pornographie, c’est un truc de gros pervers. L’érotisme, c’est mieux, c’est en tous les cas plus acceptable. Voilà ce que pensent la plupart des gens. Encore une justification, encore une excuse.
Ce n’est pas si simple que cela.
La distinction entre érotisme et pornographie repose souvent sur des critères culturels, artistiques, psychologiques et sociaux.
Les différences sont généralement les suivantes :
Intention : L’érotisme tend à suggérer, il joue avec le mystère, l’imagination du spectateur, il cherche essentiellement à susciter le désir. La pornographie est plus explicite, elle ne cache rien, elle montre, elle veut surtout susciter l’excitation.
Esthétique : L’érotisme se veut subtil, léché, doux, il veut mettre en valeur la beauté des corps, les courbes, les formes. La pornographie est plus crue, plus brutale, plus explicite, moins stylisée ; elle veut mettre en valeur l’acte sexuel, sans rechercher nécessairement le beau à travers cet acte.
La cible : L’érotisme cherche à éveiller l’émotion, le fantasme, la sensualité. La pornographie tend à provoquer surtout une stimulation physique immédiate.
Narration : L’érotisme s’inscrit fréquemment dans une histoire ou un contexte plus large qui donne du sens à la relation ou à l’attirance. C’est une démarche subtile, plus lente, dans laquelle le contexte donne le sens. Dans la pornographie, le scénario est souvent secondaire, voire absent. Le contexte n’a que peu d’importance, l’accent est mis presque exclusivement sur l’acte sexuel et non sur ce qui a mené le(s) modèle(s) à cet acte.
Oui mais non. Ce n’est à nouveau pas si simple que cela.
Il existe une zone grise entre l’un et l’autre. La frontière entre l’érotisme et la pornographie n’est pas hermétique.
Ce qui est considéré comme érotique pour certains peut être perçu comme pornographique pour d’autres : cela dépend des normes sociales, de l’époque, du contexte et de la sensibilité individuelle. Ce qui choquait les gens à une époque est rentré dans les mœurs aujourd’hui (ou inversement, c’est possible aussi).
Intention. Un photographe peut très bien chercher à susciter à la fois le désir et l’excitation du spectateur. Sa démarche peut être artistique, même s’il met en scène l’acte sexuel. Le sexe est un sujet comme un autre. L’art ne s’arrête pas à la seule nudité.
Esthétique. La pornographie peut être subtile, pleine d’imagination, douce, stylisée, même si c’est l’acte sexuel qui est au cœur de la représentation. La démarche de l’auteur reste esthétique, il peut toujours y avoir une recherche du beau dans la sexualité, même si l’image est crue, une recherche de lumière, une composition soignée ...
Cible. Et pourquoi ne pourrait-on pas éveiller à la fois l’émotion, le fantasme, la sensualité ET la stimulation plus physique, au même titre que l’on peut susciter le désir ET l’excitation ?
Narration. Il est vrai que, très souvent, il n’y a pas de scénario dans la pornographie, rien de particulier à raconter, pas vraiment d’histoire : on se contente de montrer l’acte sexuel pour ce qu’il est et rien de plus. Mais il n’en est pas toujours ainsi. On peut très bien avoir quelque chose à raconter, un contexte dans lequel replacer l’image, laisser le spectateur imaginer des choses que ne montre pas la photo. Il peut y avoir une narration qui accompagne l’image pornographique.
Faire du nu, ce n’est ni bien, ni mal.
Faire de l’érotique, ce n’est ni bien, ni mal.
Faire de la pornographie, ce n’est ni bien, ni mal.
Il n’y a pas de match, pas de médaille à gagner : un photographe qui ne fait que du « nu artistique » n’est pas meilleur ni plus respectable que celui a fait de l’art pornographique : la démarche est la même, il n’y a que le sujet qui change.
Par contre, il est vrai qu’il est bien plus difficile de faire du porn-art sans tomber dans le voyeurisme ou le vulgaire. Mais la photo quelconque d’une jeune fille en bikini rikiki qui mâche allègrement son chewing-gum en laissant apparaître ses amygdales au travers d’une bouche qui dégouline de rouge à lèvres restera toujours bien plus vulgaire et inintéressante qu’une belle photo bien composée et joliment éclairée d’une femme qui exprime du plaisir en jouant avec ses doigts, même si la jeune fille reste habillée dans le premier cas alors que la femme est nue et sexualisée dans la seconde hypothèse.
Ce n’est pas le sujet pornographique qui est critiquable en soi : tout dépend de l’intention artistique du photographe et de sa manière de composer et traiter sa photo.

merci de ce texte
Bien d'accord sur plusieurs points cependant ce que je n'accepterai jamais dans la photo pornographique c'est la vulgarité mais le plus important, une femme n'ais pas un jouet et toutes images portant a sa dégradation doit etre bani.